C’est bien connu, la mondialisation a fait de l’anglais une langue internationale et la langue de référence dans de nombreux domaines d’activité tels que l’informatique ou le marketing (pardon, la mercatique). Cette prédominance de l’anglais se traduit par une « invasion » d’anglicismes dans nos propres langues, à laquelle certaines, telles que l’italien, adhèrent totalement, ou contre laquelle certaines, à l’instar de l’espagnol, luttent férocement. Voyons donc les problèmes posés par ces anglicismes lors de la traduction et comment les résoudre.
Ne soyez pas surpris si, au cours d’un séjour en Italie, vous rencontrez une phrase comme celle‑ci : « Allumer le computer (ordinateur), brancher la mouse (souris) puis ouvrir le file (fichier) sur le desktop (bureau) ou taper un keyword (mot‑clef) dans le browser (navigateur) ». Voici un parfait exemple du caractère « éponge » de la langue italienne à l’égard des termes anglais, en particulier dans le domaine informatique. Mais il existe également d’autres exemples : « ADN » restera « DNA » (prononcé à l’italienne) et « SIDA » sera bel et bien « AIDS », bien que leurs développés soient traduits en italien. Cela dit, il n’existe pas de règle figée et certains acronymes sont effectivement traduits : « OECD » (Organization for Economic Co‑operation and Development) devient « OCSE » (Organizzazione per la Cooperazione e lo Sviluppo Economico).
En bref, lors de la traduction d’un texte en italien, il convient de se munir d’un dictionnaire italien et d’un dictionnaire anglais, lequel sera certainement très utile.
À l’inverse, la langue espagnole est très puriste et s’emploie à traduire scrupuleusement les anglicismes menaçant de l’envahir ou, si elle ne parvient pas à trouver un équivalent, adopte le terme anglais en adaptant l’orthographe et la prononciation afin de l’« hispaniser ». En effet, « weekend » devient « fin de semana » (ce qui peut porter à confusion car en français la fin de semaine désigne le jeudi et le vendredi) et « chewing gum » devient « chicle ». D’autres termes tels que « football » ou « parking » sont empruntés mais « hispanisés » en « fútbol » et « parquin ».
Quant au français, la situation est compliquée : la volonté de défendre la langue française et de lutter contre le « franglais » est réelle, mais les actions entreprises en ce sens ne sont pas toujours couronnées de succès. L’Académie française, chargée de définir et de protéger la langue française, ainsi que la Commission générale de terminologie et de néologie, dont la mission est de favoriser l’enrichissement de la langue française, tentent toutes deux de limiter l’invasion des anglicismes dans la langue de Molière, et bien que de nombreux termes tels que « logiciel » (software) ou « disque dur » (hard disk) soient facilement entrés dans l’usage, certains néologismes proposés par ces institutions n’ont pas réussi à s’imposer : le terme « mercatique » évoqué au début de cet article ne concurrence décidément pas « marketing » et l’un des échecs les plus notables a été la proposition du terme « vacancelle » pour traduire « weekend ». D’autres termes, généralement récents, sont encore sujets à controverse, à l’instar de « cloud computing », souvent utilisé tel quel malgré les équivalents « informatique dématérialisée » en France ou « infonuagique » au Québec.
En outre, il est important de noter que les acronymes sont généralement adaptés et leurs développés traduits en français : « NATO » (North Atlantic Treaty Organization) devient « OTAN » (Organisation du Traité de l’Atlantique Nord) et « WTO » (World Trade Organization) devient « OMC » (Organisation Mondiale du Commerce). Encore une fois, il n’existe pas de règle figée et un acronyme tel que « WWF » (World Wild Fund for Nature) reste identique en français bien que son développé soit traduit par « Fonds mondial pour la nature ».
En conclusion, le rapport aux anglicismes est très différent d’une langue à l’autre et il convient donc d’être extrêmement vigilant lorsque l’on traduit car il est très difficile de savoir quand conserver un terme anglais et quand le traduire. Les traducteurs sont théoriquement habilités à créer des néologismes en tant que linguistes professionnels, mais dans la pratique il est nécessaire de se référer à l’usage au sein de la langue de spécialité, même si celui‑ci privilégie l’anglais ; toutefois, le traducteur est également chargé de défendre sa langue et peut donc préférer l’équivalent officiel français au terme anglais couramment utilisé (ex : « courriel » pour « e‑mail »).